La mise sous tutelle, souvent déclenchée par une situation de vulnérabilité ou d’incapacité à gérer ses affaires, soulève des questions majeures sur le plan financier. Les frais engendrés par cette protection juridique ne sont pas négligeables et concernent les familles aussi bien que les institutions. Qui doit alors assumer ces coûts ?
Quand la justice décide de placer une personne sous tutelle, la facture ne tarde pas à arriver. Entre les démarches administratives, les honoraires des professionnels et les dépenses courantes du quotidien, la protection juridique devient vite un poste de dépense conséquent. Savoir qui règle réellement ces frais permet d’anticiper les tensions et d’assurer, autant que possible, une gestion claire et loyale.
Les frais de mise sous tutelle : qui paie quoi ?
Les acteurs financiers
Plusieurs intervenants se partagent la responsabilité financière lors de la mise sous tutelle. Le juge des tutelles nomme un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM) pour prendre la relève sur les affaires de la personne concernée. Mais qui règle la note ? Plusieurs organismes interviennent, chacun selon son champ d’action :
- État : Fournit une dotation globale annuelle pour soutenir les services associatifs.
- Conseils départementaux : Prennent en charge les mesures confiées aux mandataires préposés d’établissement.
- Assurance maladie : Intervient pour les mesures de protection liées à des soins psychiatriques.
Contribution de la famille
La famille ne reste pas spectatrice. Lorsque l’un de ses membres accepte le rôle de tuteur ou de curateur, il s’engage souvent bénévolement, par solidarité. Parfois, une indemnité vient reconnaître la charge de travail, surtout si la gestion s’annonce particulièrement prenante.
Un exemple : Gilles Lasportes verse chaque mois 221 euros à une association de tutelle pour que la protection de sa sœur soit assurée dans les règles.
Participation du majeur protégé
Le principal contributeur demeure pourtant le majeur protégé lui-même. Ses ressources et ses biens financent la mesure. Yann-Mickaël Serezo, dans son analyse sur le coût du protecteur, rappelle que cette participation, quoique fréquente, échappe souvent à l’attention du grand public alors qu’elle pèse lourd dans l’équation.
Aides et subventions
Certains dispositifs existent pour limiter la pression financière. L’Unaf et l’Interfédération PJM n’ont pas hésité à saisir le Conseil d’État pour obtenir une révision du décret de 2018, jugé trop contraignant. Des services comme ceux de Filien ADMR, spécialisés dans la sécurité à domicile 24h/24, sont parfois soutenus par des subventions publiques.
Emeric Croissant, directeur de l’Udaf de la Mayenne, insiste sur l’intérêt de ces solutions pour alléger autant que possible la charge qui pèse sur les familles et les personnes protégées.
La prise en charge des frais par la famille
Le rôle de la famille
Souvent, la famille endosse le rôle central dans la gestion financière de la tutelle. Dès qu’un parent, un frère ou une sœur accepte de devenir tuteur ou curateur, la prise en charge se fait la plupart du temps à titre gratuit. Ce bénévolat familial, largement répandu, mérite toutefois qu’on s’arrête sur ses incidences financières concrètes.
Indemnités et compensation
Il reste possible pour la famille de demander une indemnité, surtout quand la gestion devient lourde et chronophage. Cette compensation vise à reconnaître l’investissement réel, temps, déplacements, démarches, engagé pour accompagner la personne sous tutelle.
Exemples concrets
Pour mieux saisir cette réalité, voici quelques cas caractéristiques :
- Gilles Lasportes : 221 euros par mois à l’association de tutelle
Dans certaines situations, la famille verse elle-même des sommes substantielles, notamment quand les aides publiques ne suffisent plus ou lorsque les frais dépassent les plafonds de subvention.
La gestion financière par la famille s’impose alors comme une composante clé, nécessitant anticipation et clarté pour éviter les mauvaises surprises.
Le financement par les majeurs protégés
Contribution directe des majeurs protégés
Le majeur protégé, selon le code de l’action sociale et des familles, finance en priorité sa propre protection. Les frais, honoraires du MJPM, frais de gestion, sont prélevés directement sur ses revenus ou son patrimoine. Cette règle s’applique sauf exceptions, notamment en cas d’insuffisance de ressources.
Exemples concrets et témoignages
Pour illustrer, Yann-Mickaël Serezo explique que dans son cas, la gestion de ses biens entraîne une dépense mensuelle d’environ 150 euros. Ce montant est directement déduit de ses ressources, ce qui montre concrètement la contribution du protégé.
- Yann-Mickaël Serezo : 150 euros par mois pour la gestion des biens
Indemnités et aides possibles
Certains mandataires judiciaires peuvent percevoir des indemnités supplémentaires, notamment lors de situations complexes. L’attribution reste rare et doit recevoir l’aval du juge des tutelles.
Les conseils départementaux et l’assurance maladie participent aussi, notamment pour les mesures relevant du secteur psychiatrique. L’État, à travers sa dotation annuelle, soutient les services associatifs, mais ce financement ne couvre pas toujours l’ensemble des besoins.
| Organisme | Type de financement |
|---|---|
| Conseils départementaux | Mesures gérées par les mandataires préposés d’établissement |
| Assurance maladie | Mesures dans des services de soins psychiatriques |
| État | Dotation globale annuelle aux services associatifs |
Les aides et subventions disponibles
Recours au Conseil d’État
L’Unaf et l’Interfédération PJM ont engagé une action devant le Conseil d’État pour remettre en cause certaines mesures du décret de 2018. Ce texte, censé mieux encadrer la protection juridique, a provoqué de vives réactions parmi les professionnels et les familles. L’annulation partielle de ses dispositions a permis de réexaminer les règles de financement appliquées aux mandataires judiciaires.
Sécurité à domicile
Filien ADMR propose des solutions de téléassistance pour maintenir la sécurité des personnes sous tutelle, jour et nuit. Ces services bénéficient parfois d’un soutien financier des conseils départementaux, sous conditions. Emeric Croissant, à la tête de l’Udaf de la Mayenne, rappelle que ces dispositifs sont précieux pour garantir une protection effective sur le long terme.
Subventions et soutien financier
Les conseils départementaux disposent de budgets spécifiques en faveur des mesures de protection, notamment pour soutenir les mandataires d’établissement. L’État apporte également sa contribution via une dotation annuelle, accordée aux associations qui interviennent sur le terrain. Cette aide publique permet de soulager, au moins partiellement, la pression exercée sur les proches et les bénéficiaires.
Malgré l’utilité de ces dispositifs, ils ne couvrent pas toujours l’intégralité des besoins. Face à la complexité des situations, il devient impératif d’imaginer de nouvelles solutions pour garantir à chaque personne vulnérable une protection digne et adaptée. Les débats se poursuivent, et la société doit encore inventer d’autres réponses à la hauteur des enjeux.


